[E.C] Besoin de me défouler (Sophie Durance)

Ce matin là, c'est une Sophie échevelée qui fit son apparition tant bien que mal dans l'entrée de la patinoire. On aurait dit qu'elle se rendait à l'abattoir. Elle se remémora amèrement les dernières paroles de son patron, la mine effarouchée. "Tu ne comptes quand même écrire un article sur cette patinoire sans y avoir patiné une seule fois, si?" et cette fois encore, Sophie avait cédé. Qu'aurait pu t'elle faire de plus? Elle avait donc revêtu un bonnet, le jean le plus solide qu'elle possédait, deux débardeurs, un gros pull, une doudoune, une paire de gants ET une paire de moufles. Elle avait franchement l'air d'un pingouin échappé du zoo comme ça, mais pour ce qu'elle en avait à foutre.

"Bonjour, oui oui, je connait très bien toutes les avantages que pourraient m'apporter une carte d'abonnement mais figurez vous que je HAIS la patinoire donc ça m'étonnerait franchement que j'y remettes les pieds, merci."
La vieille vendeuse la regarda d'un air interloqué avant de fouiner dans ses tiroirs pour lui rendre sa monnaie tout en marmonnant sur les mentalités décidément affligeante de la "jeunesse d'aujourd'hui". Mais avant qu'elle n'ai finit son monologue, Sophie s'élançait déjà vers les vestiaires.

"Allez, ca va aller."
Murmura t'elle, les yeux mi-clos.
"De toute façon, tu n'es pas obligée de rester longtemps, allez, juste un tout petit peu, ça ira très bien. Quelle connerie de toute façon, il s'attend à quoi au juste, que je décrive une glace décidément bien plus agréable que dans untel patinoire? Mais merde, merde, merde!"

Elle chaussa les patins qu'elle venait de louer à la va-vite et s'élança d'une démarche parfaitement ridicule vers la glace.

"Mondieumondieumondieumondieumondieu."
Murmura t'elle à une vitesse affolante. Elle mit un pieds sur la glace, agrippée à la rembarde, puis deux et se détacha avec une lenteur exagérée. Dès lors, comme elle l'avait prévu, elle perdit le contrôle.

"Aaaaah!"

Elle se mit à glisser sur la glace à une vitesse affolante, agitant des bras comme une noyée dans la mer, jusqu'à ce qu'un professeur qui entraînait non loin de là de tout jeunes enfants ne la remarque et vole à son secours. Il la ramena à "la terre sèche", un sourire amusé aux lèvres.

"Je vous remercie."
Sophie roula des yeux avant de se jeter sur le premier banc qu'elle trouva. Elle ôta ses patins d'un air rageur et s'alluma une cigarette. Elle était toujours en train de marmonner toute seule lorsqu'elle se rendit compte d'une présence toute proche, sur le même banc. Elle tourna les yeux et découvrit une magnifique blonde, le genre de blonde qu'on envie, le genre de blonde à jouer dans tout un tas de films où les mecs se battent pour obtenir leur faveur. Ouais ce genre de blonde là. Elle avait un air vaguement russe et devait certainement suuuper bien se débrouiller sur des patins. Mais Sophie, d'un naturel désarmant de je-men-foutisme n'y accorda aucun intérêt et le plus simplement du monde:

"Vous devez aimer ça, non? C'est genre, LE truc qui vous fait oublier tous vos soucis?"
En tant que journaliste, ça pouvait être intéressant d'avoir un point de vue de quelqu'un de passionnée, mais Sophie elle-même était intéressée par la passion que pouvait provoquer un sport qu'elle abhorrait.

Sophie éclata de rire d'un air nerveux.
"Ah sûuuurement pas..."
Elle tirait sur sa cigarette comme si sa vie en dépendait tout en étouffant la jeune russe sous un flot de paroles.
"Tu ne peux même pas imaginer comme je déteste ce sport. De toute façon la glisse, perdre le contrôle, non vraiment c'est pas mon truc. Je préfère avoir toujours les deux pieds bien encrés dans le sol tu vois, l'illusion de la sécurité, que veux tu, je suis très vieux-jeu."
A ce moment là, Sophie avisa la jambe de la jeune fille qui était légèrement enflée.
"Parce qu'en plus ça vous dérouille les os..."
Elle se tapa la main sur le front, très loin de s'inquiéter, Sophie n'était pas prévenante pour le moins du monde. Elle se tourna à nouveau vers la jeune fille et lui tendit une main extrêmement fine:
"Sophie. Sophie Durance, journaliste. Qui es tu?"
Ses grands yeux bleu électriques fixaient les prunelles de la jeune fille sans la moindre gêne, un regard franc et droit qui en aurait mis mal à l'aise plus d'un tandis qu'elle tirait une nouvelle taffe sur sa cigarette.

[Pas trop inspirée --']

"Ah ouais? Pourquoi? Ca te plaisait plus ton pays?"
Sophie avait dit ça d'une voix in-intéressée, le regard tourné vers la glace. Elle tirait de temps à autre une latte sur sa cigarette française et murmura à voix lente:
"Moi mon pays me manque. Marre de la choucroute. Et puis c'est la galère dans l'fond, j'ai un accent français à couper à la hache, je déteste le travail que je fais ou tout du moins le patron pour lequel je bosse, on me force à patiner alors que je déteste ça et j'te rencontre toi, qui s'casse la jambe et pourtant maso, rêve déjà de retourner sur la glace. Ahahah, quelle étrange situation."
Elle écrasa sa cigarette sur le sol avant de passer une main dans ses courtes boucles brunes.